Une délégation du collectif de journalistes « Informer n’est pas un délit » a été reçue à Bercy, ce jeudi, par le ministre de l’Economie Emmanuel Macron. Même si l’échange a été positif et nos arguments écoutés, le problème demeure à la racine du texte, dans la définition même du « secret des affaires » qui figure dans un amendement au projet de loi sur la croissance et l’activité.
Les “amendements à l’amendement” évoqués par le ministre lors de ses vœux à la presse ne résoudront rien. Le gouvernement est en train d’élaborer un fourre-tout législatif dont la liberté d’informer sortira inévitablement perdante tout comme les sources, les lanceurs d’alertes et les représentants des salariés.
Nous, représentants des sociétés de journalistes de nombreux médias de la presse écrite, web et audiovisuelle, prenons acte de la volonté d’Emmanuel Macron de « garantir la liberté de la presse, la liberté d’information et la liberté d’investigation ».
Seulement voilà, la liberté d’informer sans accès à l’information n’a pas de sens.
D’ailleurs, lors de l’entretien qu’il nous a accordé ce matin, le ministre de l’Economie a reconnu « deux problèmes » :
1. L’absence totale de concertation avant l’introduction en catimini dans la loi Macron de l’amendement sur le « secret des affaires ». « Ce n’est pas ma méthode », a fait savoir le ministre.
2. Le texte soumis à discussion à l’Assemblée nationale est susceptible d’entrer en contradiction avec l’actuelle loi sur la protection des sources des journalistes. Ce qui rend indispensable la nécessité d’une approche harmonisée de la question. « C’est aussi un problème qu’il faut prendre en compte », a convenu M. Macron.
Si nous comprenons qu’il faille légiférer sur la protection des entreprises contre l’espionnage industriel, rien n’oblige à le faire dans la précipitation au risque d’ouvrir la voie à des dérives liberticides pour l’information du public.
C’est un enjeu trop important pour l’appréhender sans solliciter une concertation citoyenne, pluraliste et contradictoire comme c’est l’usage pour n’importe quel texte de loi.
Nous réitérons donc notre demande ferme de retrait de l’amendement sur le « secret des affaires ». C’est l’étape indispensable pour pouvoir engager une réflexion apaisée à la hauteur des enjeux, tant du côté des entreprises que de l’information.
Nous avons sollicité une audience auprès du chef de l’Etat, qui s’est publiquement engagé à plusieurs reprises en faveur de la liberté d’informer et d’une meilleure protection des sources des journalistes, afin de lui faire part de notre détermination à ne pas accepter ce texte et de l’urgence d’une concertation digne de ce nom.