Affaire Luxleaks : le secret des affaires passe avant le secret des sources !

Une entreprise a-t-elle le droit d’aller faire perquisitionner chez l’un de ses salariés afin de l’empêcher de continuer à communiquer des documents d’intérêt public à un journaliste ?

Si l’on en croit le Président du Tribunal de Grande Instance de Metz, la réponse est oui :
– Oui, une entreprise peut accéder à la correspondance du salarié, y compris celle qu’il entretient avec un journaliste.
– Oui, une entreprise peut tarir la source d’un journaliste et ainsi empêcher la diffusion de documents, même si leur publication va clairement dans le sens de l’intérêt général.
– Et oui, l’entreprise peut donc faire primer le secret de ses affaires sur le secret des sources.

Ainsi le mardi 6 février 2018, le journaliste Edouard Perrin a été débouté par le TGI de Metz dans son assignation en référé contre PriceWaterhouseCoopers (PWC) Luxembourg. (lire l’ordonnance

Le reporter de l’émission Cash Investigation, à l’origine des révélations du scandale LuxLeaks, avait entrepris cette action en justice pour dénoncer une violation manifeste du secret des sources par le cabinet PWC, ce dernier ayant demandé la saisie de la correspondance d’Edouard Perrin et de Raphaël Halet, l’un des deux lanceurs d’alerte à l’origine de l’affaire LuxLeaks.

Précisons que le Procureur de la République avait fait la même analyse. Il avait clairement conclu qu’il s’agissait d’une violation manifeste du secret des sources et qu’il fallait annuler la procédure qui avait permis cela.

Manifestement Pierre Wagner, le Président du TGI de Metz, n’en a tenu aucun compte et a repris pour l’essentiel les arguments de l’entreprise. Y compris les plus farfelus, comme prétendre que le journaliste Edouard Perrin n’avait aucun intérêt légitime dans cette affaire. En oubliant que la fonction première du journalisme consiste à révéler des informations d’intérêt public et que, par ailleurs, Edouard Perrin est également président du Collectif Informer n’est pas un délit (INPD).

Débouté, le journaliste est en outre condamné à verser 3000 euros afin de rembourser les frais de justice engagés par PWC ! Un comble… en plus d’une très grave atteinte au secret des sources illustrant les dangers concrets que fait peser le secret des affaires, sur le droit à l’information.

Edouard Perrin entend faire appel de la décision. Le bureau du Collectif INPD lui apporte son soutien sans réserve.

Le bureau du collectif “Informer n’est pas un délit”